Un solo de Josef Nadj d’après son journal et des poèmes d’Otto Tolnai

 

Chorégraphie et interprétation

Josef Nadj

 

Musiques

Percussions d’Ethiopie, “Akira Sakata”, musiques traditionnelles de Hongrie, de Roumanie et du Mexique.

 

Scénographie

Josef Nadj et Rémi Nicolas

 

Lumières

Rémi Nicolas

assisté de Xavier Lazarini

 

Costumes

Bjanka Ursulov

 

Décors

Michel Tardif

 

Peinture des décors

Jacqueline Bosson

 

Conception vidéo

Thierry Thibaudeau

 

Coproduction

Centre Chorégraphique National d’Orléans, Théâtre de la Ville – Paris, Biennale de Venise

 

Création

Biennale de Venise, 6 juin 2002

 

Durée

1 heure

« Je dirais que c’est une histoire très rapprochée, presque intime. Le thème de ce solo-là est le souvenir de mes amis. Peintres et sculpteurs, qui se sont suicidés, à un moment donné – de ma ville natale. Il s’agit de Kanjiža. Ce n’est pas vraiment un journal écrit, c’est le journal de ma mémoire. Et l’inconnu, c’est, ça désigne un peu pour moi la mort. La mort, ce qu’on porte en nous-même, qui est donc ce mystère qui nous interroge, qui nous attend quelque part. Et qui écrit aussi son journal en nous-mêmes à sa façon. »

 

Josef Nadj

"J'ai peur que tu ne fasses une exception pour moi" de Otto Tolnai

Seigneur je t’en supplie ne me sauve pas

ce serait plus viril comme ça

ne me sauve pas

en dépit de mes prières

écolier se repentant de son premier péché mortel

je t’implorerai sans fin

ne me sauve pas

remplirai-je de mes larmes

tous tes récipients

tes dés à coudre bosselés

tes tonneaux énormes

sangloterai-je

dans toutes tes chaussettes noires trouées

seigneur je t’en supplie ne me sauve pas

laisse le rat

cet ouvrier zélé perceur de tunnels

se faire un chemin à travers mon ventre

laisse le loup

enfermé en moi

mâcher bruyamment mon visage

émerveille-toi plutôt de nous voir

plus que tu ne le fus jamais

en voyant des amants épris

Seigneur je t’en supplie ne me sauve pas

entends ma prière débâcle de glace pure

ne me sauve pas

je sais tu n’as jamais sauvé personne

mais j’ai peur que tu ne fasses une exception pour moi

je t’en supplie ne me sauve pas Seigneur je t’en supplie ne me sauve pas.

 

Otto Tolnai, "J'ai peur que tu ne fasses une exception pour moi"

Extrait de Or brûlant, recueil de poèmes traduits du hongrois par L. Gaspard, S. Clair et J. Lackfi

Préface de Josef Nadj

Editions Ibolya Virag, 2001

Journal d'un inconnu, vu par Myriam Bloedé

Il aura fallu quinze ans à Josef Nadj pour aborder la forme du solo et – sans doute parce qu’il s’agit de sa première expérience en la matière –, Journal d’un inconnu est sa pièce la plus introspective, la plus clairement autobiographique.

 

Renouant avec ses premières créations, elle se présente en effet comme une nouvelle évocation de Kanizsa, sa ville natale, puisqu’elle est explicitement composée « d’après » le journal du chorégraphe et des poèmes d’Otto Tolnai – qui en est également originaire. Cependant, à travers leurs écrits respectifs, Journal d’un inconnu rend surtout hommage à trois personnalités de la ville. D’une part, au mythique Laszlo Toth, ce géologue australien natif de Kanizsa qui, en 1972, se rendit célèbre dans le monde entier… pour avoir défiguré la Piéta de Michel-Ange à Rome ; d’autre part, à deux hommes que Nadj a côtoyés et qui, tous deux, se sont donné la mort : Tihamér Dobó, le peintre vagabond, et Antal dit Toni Kovács, l’ancien lutteur devenu sculpteur.

 

Référence manifeste à Nadj lui-même, l’« inconnu » du titre signale, bien sûr, cette part irréductible d’étrangeté à soi-même qui est notre lot commun. Mais il désigne, plus encore, le territoire qu’arpentent, chacun à sa manière, l’iconoclaste, les deux artistes, tout comme Josef Nadj et son ami poète Ottó Tolnai : avec leur part d’inachèvement, de fragilité, avec la place qu’ils tiennent ou devraient tenir dans nos vies, l’art et la création constituent, en effet, la question centrale de Journal d’un inconnu.

 

 

Myriam Bloedé

Journal d'un inconnu, vu par Rosita Boisseau

Il est seul en scène pour la première fois en dix-sept ans de danse. Avec Journal d'un inconnu, le chorégraphe Josef Nadj (né en 1957) se jette à l'eau. Il s'entoure d'un décor comme il les aime. Une palissade en bois, des cadres, une table (celle de son grand-père), une chaise... La scène de Josef Nadj porte en creux son passé. Fils de charpentier, petit-fils de paysan, Josef Nadj dit qu'il "danse sa mémoire". Celle de son village natal de Kanjiza, dans l'ex-Yougoslavie, en est le coeur battant. Dans ce reportage sur son travail, il confie qu'il rend hommage dans ce solo à ces amis, peintres et sculpteurs, qui s'y sont suicidés. Solo de souvenirs, transe de fantômes, de perte et de peur, Journal d'un inconnu dessine aussi en creux l'auto-portrait d'un homme dont l'identité chavirée ne se répare que sur scène.

 

Kanjiza (12 000 habitants) est située en Voïvodine, enclave hongroise de l'ex-Yougoslavie, aujourd'hui située en Serbie. Coupée en deux par le fleuve Tisza, affluent du Danube, elle est la ville que "tout le monde rêve de quitter sans y réussir". Nadj y retourne régulièrement. Il y possède sa bibliothèque. En conteur, il a fait de cette bourgade inconnue un mythe. En 1987, son premier spectacle, Canard Pékinois, créé avec succès au Théâtre de la Bastille, à Paris, racontait les souvenirs d'un gamin qui s'entraînait aux arts martiaux dans un théâtre où une troupe d'acteurs se suicida; Sept peaux de rhinocéros (1988) plonge dans la longue agonie du grand-père du chorégraphe; Les Echelles d'Orphée (1992) saluent les pompiers de Kanjiza, champions du monde des pompiers à Turin en 2011. Sur un autre ton, au croisement de la danse et de la peinture, Les Corbeaux (2009), oiseaux de la sagesse dans le pays de Nadj, évoquent ceux de la region de Kanjiza qu'il a longtemps observés avant de les danser... Cette géographie intime, nourrie par des lectures nombreuses, a trouvé une incarnation unique dans le théâtre dansé de Nadj. Sa formation en mime, au début des années 80 à Paris, puis en danse, a contribué à sculpter sa gestuelle unique d'homme-pantin secoué par ses pulsions.

 

Rosita Boisseau

Dates passées :

 

28-29 mai 2009

MC2

Grenoble (FR)

 

22-23 novembre 2008

La Comédie

Clermont-Ferrand (FR)

 

8-9 novembre 2008

Festival Euro-Scene

Leipzig (DE)

 

9 juin 2008

Bratislava in Movement

Bratislava (SK)

 

27 octobre 2007

Festival internacional de teatro

Quito (ECU)

 

17-18 juillet 2007

Teatro Restori

Cividade des Friuli (IT)

 

20 avril 2007

L’Archipel, Scène Nationale

Guadeloupe (FR)

 

8-9 mars 2007

Théâtre de Nîmes

Nîmes (FR)

 

1-2 mars 2007

Théâtre 140

Bruxelles (BE)

 

3-4 mai 2005

Bonlieu Scène nationale d’Annecy

Annecy (FR)

 

25-26 février 2005

The Tramway

Glasgow (UK)

 

14 janvier 2005

Théâtre le Minotaure

Vendôme (FR)

 

11 janvier 2005

Théâtre Magdalenazaal Cultuurcentrum

Bruges (BE)

 

1-2 décembre 2004

Festival Net Meyerhold Center

Moscou (RU)

 

15-16 avril 2004

Espace des Arts

Châlon-sur-Saône (FR)

 

9 avril 2004

Espace Soutine

Lèves (FR)

 

2-3 avril 2004

Dansens Hus

Stockholm (SE)

 

20 mars 2004

Théâtre Jean-Lurçat Scène nationale d’Aubusson

Aubusson (FR)

 

16-17 mars 2004

Le Trident Scène nationale de Cherbourg

Cherbourg (FR)

 

7 novembre 2003

L’Espal

Le Mans (FR)

 

27-28 septembre 2003

Kaserne

Basel (CH)

 

17 juillet 2003

Impulstanz Vienna International Dance Festival

Vienne (AUT)

 

10-25 janvier 2003

Scène nationale d’Orléans

Orléans (FR)

 

17-21 décembre 2002

Théâtre de la Ville Les Abbesses

Paris (FR)

 

5 novembre 2002

Obrazovna Kulturna Ustanova Cnesa

Kanjiza (SRB)

 

30-31 octobre 2002

Trafo

Budapest (HUN)

 

6 juin 2002

Biennale de Venise, Teatro Piccolo Arsenale

Venise (IT)